« C'est une année entière que je vais passer dans les huit mètres carrés de ma caboulotte. Ce mot est une contraction entre roulotte et cabane, un terme qui décrit parfaitement l'habitat fabriqué par l'homme qui m'aimait et qui ne m'aime plus. Elle est posée sur aire naturelle dans les hauteurs d'un village drômois, au milieu des pins, des chênes et des prés où viennent braire les ânes. » Fabienne Swiatly a posé ses valises (légères) dans sa caboulotte pendant un an. Voici le récit, au fil des saisons, de cette expérience peu ordinaire.
Le narrateur, comptable de son état, installe sa mère dans une maison de retraite. C'est un déchirement mais aussi l'occasion pour lui d'évoquer la vie d'une femme lumineuse qui a quitté l'Italie fasciste pour s'installer dans les Alpes françaises. Le voyage faillit tourner court, car sans le sou, elle n'avait qu'un billet de train pour Modène (en Émilie-Romagne) et non pour Modane où l'attendait son père.
Patrick Cloux décrit et raconte l'année pratique et régulée d'un apiculteur. Il entrecroise cela avec l'évocation d'un auteur, des peintures d'une église romane, celle des parterres fleuris ou le bricolage d'un apiculteur dans un village grec... Le lecteur peut en apprendre un peu sur la vie, l'ordinaire, les rythmes, les interventions autour d'un rucher mais il ne s'agit pas du tout d'un livre technique. Il poursuit la célébration ordinaire et purement littéraire du bonheur qu'il y a à faire autant de gestes particuliers pour mener un rucher.
Schizogramme : n.m., de schizein, couper, et graphein, écrire. Néologisme créé en 2022 par l'auteur, désignant un écrit sur la schizophrénie. En l'occurrence, la vingtaine de schizogrammes composant ce recueil évoquent ici une tranche de vie, là un destin, ailleurs la folie douce de l'institution psychiatrique. Vingt occasions de s'émerveiller face aux trouvailles du délire, de s'émouvoir des détresses qu'organise la psychose, de pointer l'étonnante contagiosité de la folie.
Ces vignettes sont à lire comme des fictions vraies. Ces évocations d'hurluberlus sont aussi l'occasion de contrecarrer la peur du fou. A la construction médiatique du " schizophrène dangereux " s'opposent ici des figures de malades vulnérables, saugrenus, poétiques.
Emilio Lussu est né en 1890 en Sardaigne. Héros de la Première guerre mondiale, il est élu député en 1921et s'oppose de toutes ses forces au fascisme. Lussu devient un homme à abattre. Les fascistes de Cagliari attaquent sa maison. Lussu est seul. Il tue un jeune fasciste. Les juges sardes relachent Lussu qu'ils considèrent en état de légitime défense. Mais le ministère de l'Intérieur condamne cet adversaire incorrigible du régime à cinq ans de déportation. Il est transféré sur l'île de Lipari dont il s'échappe infligeant un terrible camouflet au régime mussolinien. Pendant la guerre, il participe à la Résistance et fait de nombreux séjours en France et notamment à Marseille. C'est à partir de ce séjour marseillais que Francis Pascal retrace le parcours de cet homme, au destin romanesque.
Gaby Aspinall n'a rien du gendre idéal.
De toute façon, il n'a pas l'intention de se marier et il cultive un cynisme à toute épreuve. Rien ne trouve grâce à ses yeux. Il déteste, en vrac, les syndicats, Nespresso, Alain Souchon, le rugby, ce sport de gros cons...
Ce parfait salaud a pourtant, au plus profond de lui, des failles abyssales qui lui redonnent un peu d'humanité.
Acheteur dans une multinationale en cours de rachat par les Américains, Gaby se révèle aussi amoral que l'entreprise qui l'emploie.
Mauvais coûts, malgré la noirceur de son personnage, est un livre drôle, rythmé par des dialogues enlevés.
Il y a dans l'écriture de Jacky Schwartzmann une filiation avec le Iain Levison d'Un petit boulot.
Le froid est plein d'or. La mort pleine de couleurs. Dimanche trottine tout nu sur le parquet gris clair. Demain c'est la rentrée. On pousse les volets, on ouvre les fenêtres et les portes des cages. Un rayon beau comme un sabre de bourreau tranche la robe des dernières roses blanches qui osent tenir tète à septembre. Le café´c'est doux et amer à la fois c'est sûrement pour cela que je l'aime tant. Pas à pas dans les petits pas d'aujourd'hui. Une joue salie de chocolat, l'odeur d'un cartable neuf. On va laisser le froid un petit peu entrer puis en fermant la porte le chaud sera plus chaud. Chaud comme un dimanche de rentrée. La vie c'est aussi beau que de jouer aux billes avec des crottes de lapin. Vivement pas demain.
Petites proses de rien posées là dans la main.
A la guerre, remarque mario rigoni stern, on peut mourir à vingt ans, en une seconde, sur l'herbe, en plein printemps.
Aucune polémique, aucun pathos, aucun héros dans le récit de cette guerre qui emmena mario rigoni stern en france et en albanie de 1940 à 1941, rien que la réalité. tourmenté par les souvenirs et par les poux, rigoni stern traverse cette épreuve en moraliste pacifique. " pour la plupart d'entre nous commença la fin de tout. ".
Dans ce court récit, Antoine Choplin rend hommage à Ceija Stojka, cette artiste inclassable.
Lors d'une cérémonie en l'honneur de l'artiste et alors qu'un homme en complet déroule un discours officiel, la narratrice, ami d'enfance de Ceija Stojka et complice de vie, se souvient de son parcours hors norme.
Déportée à l'âge de dix ans, Ceija Stojka survit à trois camps de concentration, Auschwitz, Ravensbrück et Bergen-Belsen. C'est à cinquante-cinq ans qu'elle rompt le silence et se lance dans un travail de mémoire, lequel donne naissance à plusieurs récits et à plus d'un millier de dessins et de tableaux alors qu'elle est autodidacte.
Le livre est accompagnée d'illustrations de Ceija Stojka.
Un homme sur une moto à laquelle est accrochée une remorque bringuebalante traverse la campagne ukrainienne. Il veut se rendre dans la zone interdite autour de Tchernobyl. Il a une mission.
Le voyage de Gouri dans ce noman's land est l'occasion pour lui de retrouver ses anciens amis et d'évoquer un monde à jamais disparu où seule la chaleur humaine a survécu au désastre.
Bedrich Fritta se retrouve enfermé avec sa femme et son fi ls dans le ghetto de Terezin.
Séparé des siens, il se retrouve a ecté à l'atelier dessin du camp. Les jours s'étirent lentement entre l'élaboration de plans pour les bâtiments de Terezin et un quotidien de survie avec parfois des moments intenses avec sa femme et son fi ls. Très vite, les membres de l'atelier commencent à dessiner la réalité de Terezin avec l'espoir d'informer le monde sur leurs conditions de vie. Mais les nazis vont interrompre de façon brutale cette initiative. Alors commence pour Bedrich un aller sans retour vers l'enfer. Antoine Choplin s'est inspiré des dessins de Bedrich Fritta pour raconter cette histoire.
« Puis je le vois.
Il lance haut une balle qu'il tente de rattraper du pied. Il joue mal alors il recommence. Un coup de pied fort et la balle atterrit près de moi. S'il veut la récupérer, il faudra passer la frontière des pylônes. Je ramasse la balle. J'hésite puis lui la lance et déjà il me la renvoie.
C'est un jeu qui débute. Pas besoin de présentations. » Au cours d'un été qui s'étire mollement, la narratrice rencontre Saïd, un gamin de la cité.
Pour elle c'est la découverte d'un nouveau monde. Les préjugés tombent. Ce récit, autour d'amours adolescentes, est un hymne à l'altérité.
1940, en pleine débâcle, Louis au volant d'un camion fuit devant l'arrivée prochaine des Allemands. Sa cargaison est précieuse.
Il transporte des tableaux du Louvre. Sur la route, il dépasse une femme. Il ne doit pas s'arrêter. Et pourtant! la rencontre avec Sarah va changer sa vie.
Marie va mourir. Elle demande a` son fils de la porter dans la montagne pour la de´poser sous le grand rocher. C'est un court roman sur l'ubasute, cette pratique mythique au Japon, consistant à porter un infirme ou un parent âgé sur une montagne, ou un autre endroit éloigné et désolé, pour le laisser mourir.
Une dernie`re chance pour Marie de parler a` son fils.
" là-haut, la montagne est silencieuse et déserte.
La neige qui est tombée en abondance ces jours-ci a effacé les sentiers des bergers, les aires des charbonniers, les tranchées de la grande guerre et les aventures des chasseurs. et c'est sous cette neige que vivent mes souvenirs. " " on trouve rarement pareille cohérence entre l'homme qui vit et l'homme qui écrit, pareille densité d'écriture. " primo levi.
Tout a été écrit sur ce match d'anthologie... ou presque ! Hantés par les fantômes de Séville, Didier et Fred, deux potes fans de foot à la limite de la névrose, décident de nos jours de mener l'enquête.
En visionnant la 50e minute de la tragique demi-finale de 82, L'auteur remarque un détail que personne n'a vu à l'époque et qui explique l'impensable.
Il veut maintenant rechercher auprès des acteurs historiques la « vérité du match ».
Il ignore que c'est la sienne qu'il va trouver.
Car le football est un petit théâtre intime qui parle aussi de nous.
On a ouvert les portes. Si ce n'est la lassitude des corps accumulée depuis toutes ces années, rien n'empêche plus ces hommes et ces femmes de quitter le camp. Ils sont libres. La plupart restent là pourtant, espérant l'arrivée d'hypothétiques camions. Quelques autres, sous l'impulsion du robuste Garri, entreprennent de partir à pied. Il s'agira pour eux de rejoindre les plaines du Nord-Est, là où il se pourrait que tout soit encore comme avant, et qu'une vie nouvelle puisse s'y reconstruire. Enfin, cela reste à vérifier.
En tout cas, avant cela, il faudra bien franchir les longs plateaux, les villages dévastés, et surtout, la barrière redoutable des hautes montagnes...
Nord-Est est le récit d'une expédition, aux ressorts profondément humains, entre fable et western métaphysique.
Une femme d'environ soixante-dix ans a été retrouvée morte, dans un coffre de toit, sur un terrain vague, à Lyon. Elle a été soigneusement peignée, maquillée, elle porte une belle robe et a les mains croisées sur le ventre, comme si on l'avait préparée pour son enterrement.
Le Coffre est une enquête policière menée sur deux fronts, à la fois à Lyon et à Bucarest.
Côté français, Garnier, un gendarme de la Section de Recherche à un mois de la retraite est chargé du dossier. Côté roumain, c'est le commissaire Marian Duca qui s'y colle.
Un auteur roumain, un auteur français... un flic roumain, un flic français. Le récit est mené tour à tour par le Français et par le Roumain, un chapitre chacun. Les deux flics racontent leur enquête.
LES ARBRES de Mario Rigoni Stern ont la même beauté austère que les personnages de ses livres. Il n'en parle pas seulement comme un botaniste nourri de culture classique qui connaît toutes les vertus des arbres et de leurs fruits : il accroche aussi à leurs branches comme les boules d'un sapin de Noël, souvenirs d'enfance et de guerre, histoire de cet Altipiano au climat rude dont il est originaire. « ... et si, à la fin, j'ai réussi à vous communiquer un peu de mon amour des arbres, j'aurai le coeur plus léger ».
" Lire Mario Rigoni Stern, c'est s'abreuver à la beauté, à la fraternité, se nourrir de mots doux et loyaux, de ceux qui susurrent le raffut du monde en empruntant les chemins de la poésie. " Martine Laval, Télérama.
Avec de´licatesse et poe´sie Thomas Vinau, chante « la petite fume´e de nos vies ».
Il cherche le mot juste pour dire la solitude des matins gris, la lassitude des jours qui se ressemblent, puis, comme un e´clair, la beaute´ d'un instant suspendu.
Ses poe`mes en prose sont a` la fois me´lancoliques et lumineux.
Lire Thomas Vinau c'est porter un regard diffe´rent sur les choses et les situations du quotidien. C'est se laisser entrai^ner dans une re^verie poe´tique, des textes courts ou` les e´motions se chevauchent, nous faisant passer du sourire a` la profondeur.
Ernesto est astronome dans le modeste observatoire de Quidico au Chili. Il étudie les nuages de Magellan, une galaxie naine. Il vit seul dans ce territoire mapuche avec son chat, Le Crabe et Walter un vieux télescope peu performant.
Lors d'un voyage à Santiago, dans l'espoir de trouver le financement pour une pièce (lame de Schmidt) de son télescope défectueux, Ernesto ne peut s'empêcher de visiter le musée de la Mémoire où une photo de Paulina, sa fiancée disparue durant la dictature de Pinochet le plonge dans un passé douloureux.
C'est dans ce même musée qu'il fait connaissance d'Ema qui porte elle aussi une histoire lourde.
Ils devront surmontés les blessures jamais cicatrisées de cette terrible période.
" C'est un texte extraordinaire, un peu comme si Jean Moulin avait échappé à Barbie et nous avait laissé le témoignage de ses tortures et de sa tentative de suicide.
Bolis était un des chefs de la Résistance à Gênes, il a été arrêté en février 1945 par des fascistes aux abois enragés par leur proche défaite. Bolis n'est pas identifié, mais on se doute de l'importance de la prise : après les sévices habituels, Bolis, pris en main par le chef des tortionnaires, ne parle pas. Mais, jour après jour, les tortures deviennent plus raffinées ; à demi mort, il craint toujours de craquer et il décide de se suicider avec une lame de rasoir qu'il a camouflée.
Le récit devient alors insoutenable, mais il faut le soutenir, il faut lire ces pages, non par voyeurisme sadique mais pour aller au bout de l'expérience de vie, pour tirer la leçon de ce supplice que s'inflige Bolis : faire ce qu'aucune bête n'aurait fait, comme dit Saint-Ex à propos de Guillaumet naufragé dans les Andes. " Michel Polac, Charlie Hebdo.
« La Rome vagabonde de Lodoli n'appartient à aucun guide touristique : c'est une ville d'îlots de beauté et de poésie qui émergent d'un dimanche pluvieux, ou d'un après-midi ensoleillé, mais que seul un oeil clairvoyant est capable de saisir.
C'est une place immobile redevenue une toile de De Chirico ; une statue nichée dans une église hors des sentiers battus ; un bar où la nuit se transforme en odyssée
de solitudes, d'amours et d'existences fortuites. Autant d'infimes découvertes que Rome offre à celui qui est en mesure de fouiller les détails, et est prompt à s'esquiver pour filer loin de la foule, emprunter au hasard une ruelle, jeter un oeil à une arrière-cour et fureter entre les pierres de la cité à la recherche d'une île insoupçonnée. Lodoli musarde dans la ville éternelle, se laissant envoûter par les insignifiants charmes urbains. Il faut savoir y retenir le temps et apprendre à se dépoussiérer le regard pour en éprouver l'instant profond. »